Le 12 janvier 2021 lors de l’audition de la Commission des Affaires Culturelles de l’Assemblée Nationale, Roselyne Bachelot, Ministre de la Culture revient sur l’impact de la crise sanitaire sur l’industrie culturelle. La crise a permis aux plateformes comme Netflix ou Disney + d’agglomérer encore plus de clients, délaissant le financement d’œuvres européennes déjà acculées par une baisse significative des revenus publicitaires.
En répondant à Aurore Berger qui manifestait son inquiétude de voir une « uniformisation de notre pensée et de la création artistique », la Ministre a immédiatement rassuré cette dernière en promettant un rééquilibrage des régimes juridiques. Effectivement, le Président de la République s’était engagé à contraindre les plateformes à participer activement au financement des œuvres audiovisuelles, au lieu de simplement les exploiter.
Il est donc temps de ne plus opposer les contenus traditionnels des opérateurs historiques d’un côté et les contenus non linéaires de l’autre, comme le dit Roselyne Bachelot : « opposer la culture patrimoniale et la culture numérique, si on va dans ce sens on va dans le mur. Au contraire il faut la considérer comme une opportunité mais nous devons la qualifier ».

L’article 17 (ex-article 13) : LE sujet épineux
Rappelons-nous, cet article avait pour objet de réviser la responsabilité des plateformes en cas de diffusion de contenus non autorisée. Une idée louable en principe mais répressive en pratique. Une vague de contestation s’était alors levée notamment de la part des vidéastes car une transposition trop stricte du texte aurait rendu leur profession impraticable en confinant excessivement leur liberté de création. Retrouvez la lettre ouverte réalisée par la Guilde des vidéastes à l’attention de la Ministre de la Culture sur ce sujet :
La question de l’exception : le duel ayant-droit vs. vidéaste
Aussi, contrairement à nos voisins américains, le droit européen ne reconnaît pas l’exception de fair use. Ainsi la place des exceptions prévues à l’article 122-5 du Code de Propriété Intellectuelle a posé question dans la directive « droit d’auteur ». Par essence, une exception est une dérogation au droit général en vigueur. Un.e vidéaste n’a donc jamais « droit » à une exception.
Toutefois, il faut garder à l’esprit qu’une exception ne concurrence pas le droit d’auteur. Au contraire, en aménageant certaines dispositions, les exceptions renforcent le droit d’auteur en le complétant, et protège ainsi la liberté de création. C’est pour cela qu’il nous paraît important de mettre davantage en lumière la question des usages légitimes et celle des exceptions afin d’apporter une lecture précise du cadre d’usage et ainsi protéger autant les ayants droit que la liberté de création.
L’importance du rôle de tiers arbitre
Il est en conséquence essentiel de concevoir cette transposition comme une opportunité d’équilibrer les règles du jeu mais aussi de préciser le rôle et les responsabilités de chacun.e.s.
Cet équilibre ne pourra finalement être atteint qu’en consacrant l’importance d’un tiers arbitre. En effet, au-delà de la phase précontentieuse, la plateforme qui héberge les contenus potentiellement litigieux ne devrait pas prendre part au litige pour des raisons évidentes de conflit d’intérêt.
Il semblerait que la Hadopi puisse remplir ce rôle, à voir comment ses obligations et devoirs s’articuleront pour garantir aux utilisateurs des plateformes la saisine rapide d’un tiers arbitre compétent. Enfin, les moyens mis en œuvre pour assurer une telle fonction devront être surveillés car on ne peut plus insuffisants pour le moment.
La transposition de ce fameux article 17 devrait se faire dans cet esprit harmonieux en espérant enfin arriver un régime juridique équitable et équilibré, conforme au droit d’auteur à la française.
Pour plus de détails, retrouvez ce Live sur le sujet :